THESTEIDZ.COM | 26.11.2024 | ART CONTEMPORAIN / EXPOSITIONS
Nouvelle venue dans le Haut-Marais, la galerie Prima inaugure son espace avec l’exposition “MeetLife” de Bryce Delplanque (né en 1993). Entre classicisme et hybridation, l’artiste réinvente la nature morte dans un jeu subtil de dialogues visuels.
Tandis que les commentateurs égrènent les fermetures, Prima, elle, vient d’ouvrir ses portes, rue Notre-Dame de Nazareth, dans le 3e arrondissement de Paris. Fondée par Laetitia Ferrer et Sébastien Borderie, la nouvelle galerie se donne pour mission de soutenir une jeune génération d’artistes, alliant l’innovation et le respect des fondamentaux de l’histoire de l’art. Dans leur espace tout juste rénové, les deux acolytes qui collaborent depuis déjà dix ans, souhaitent également encourager l’émergence de nouveaux collectionneurs, en rendant l’art contemporain plus accessible. “Prima” pour le premier achat, la première œuvre, ou la première exposition.
À l’occasion de son inauguration, la galerie présente ainsi le travail de Bryce Delplanque avec “MeetLife”, série débutée en 2023. Réinterprétant le genre de la nature morte, en détournant notamment le terme anglais still life, l’artiste associe des compositions de Fantin-Latour (1836-1904) reproduites en noir et blanc au fusain, à des éléments visuels colorés, empruntés à l’univers des estampes japonaises de Kuniyoshi (1798-1861). Par ces collages et cette esthétique de l’hybridation, Delplanque perturbe les codes traditionnels et invite le spectateur à reconsidérer les liens et les échos qui se répercutent d’un bout à l’autre de l’histoire de l’art. Au-delà du dialogue entre deux aires géographiques, deux cultures, il opère également la rencontre de deux styles : un trait académique, précis et nuancé, et un dessin plus pop, plus naïf, plus coloré. Il s’amuse enfin du statut de la peinture, surjouant son caractère décoratif et sa qualité d’objet par l’exagération du volume de ses toiles. Épais d’une dizaine de centimètres, leurs châssis exhibent en effet une tranche généreuse, que Bryce Delplanque décore — osons le terme — d’un motif de faux bois.
Au fond de la galerie, un très grand format perturbe encore différemment le regard. On y retrouve le même arrière-plan délavé de fusain, ainsi que les mêmes motifs empruntés à Fantin-Latour : un joli bouquet, des fruits, un verre rempli. Toujours, aussi, ces éléments hétérogènes, colorés et mal dégrossis, extraits du corpus de Kuniyoshi. Mais l’on s’approche et l’on se rend compte qu’il ne s’agit pas d’une toile comme les autres, mais d’un dessin réalisé à même le mur, et que certaines parties, la coupe et le petit pot garni dans la partie inférieure, sont en réalité des volumes, découpés et collés sur la composition. Ici, la peinture joue au dessin, qui joue lui-même à la fresque, tandis que quelques éléments dissidents s’amusent à sortir du cadre, qui n’en est pas tout à fait un. « Comme l’exprime Gérard Wajcman, rappelle Delplanque dans le texte qu’il signe pour accompagner son exposition, la nature morte se résume à une équation simple : une chose + un regard. » Un regard pour démêler le vrai du faux, le fuyant du saillant, pour contourer, contourner, et peut-être avant tout pour se perdre au jeu de la séduction des images.
Avec “MeetLife”, Bryce Delplanque, qui exposait il y a quelques semaines encore au Drawing Hotel, à Paris, signe une inauguration réussie pour la galerie Prima. En brouillant les limites entre techniques, supports, cultures et époques, son travail incarne l’esprit de ce nouvel espace : un lieu dédié à la jeune création, où l’expérimentation dialogue librement avec l’histoire. Une ouverture prometteuse qui positionne Prima parmi les galeries émergentes à suivre.
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Exposition “MeetLife” by Bryce Delplanque
Jusqu’au 18 janvier 2025 at Galerie Prima
13, rue Notre-Dame de Nazareth – 75003 Paris
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